litanie

Dans le désarroi du monde, quand notre univers s’effondre, que voir ? Que regarder ? Où porter sa pensée ? Comment voir ? A bout, que faire d’autre que des photographies de rien dans l’espoir de retrouver du sens par la vue ? Où porter ce regard ? Rien à regarder que les murs, le sol, le ciel et l’eau. Comme la petite fille aux allumettes démunie dans un réel gelé, on craque ses dernières allumettes et on projette ses rêves ou ses manques pour faire apparaître des images prometteuses. Les images qu’elle voit sont intangibles, suspendues dans les airs comme des hologrammes : elles l’enveloppent de cette chaleur illusoire. Par cette présence réconfortante l’image offre une issue possible.

Dans l’installation « in the sky on the water on the floor in the wall », des allumettes géantes constituent des totems supportant les litanies de petites images de surfaces identifiables (zoom sur un précisément là) et intemporelles (flottement ambigu d’un ancrage). Dans l’installation, d’autres présentations consistent encore en des panneaux uniques ou polyptyques, de format panoramique, supportant les mêmes litanies, dont l’accumulation retrace la promenade hasardeuse d’un œil. Le manque de repères durant chaque déambulation cherche à fixer une pensée sur les surfaces optiques d’espaces d’infinitudes. Le liquide. L’atmosphère. Le socle. L’obstacle.

La répétition de l’acte optique engage des images de survie en retraçant des chemins signifiants à partir d’un égarement, en superposant une prière du monde sur le réel. Ces images sont autant de photographies, au cadrage très serré, de plans d’eau, d’étendues de ciel, de surfaces de sol et de pans de mur. La répétition d’un cadre focalisé sur des parts spatiales incontournables et peu narratives fabrique des décollements du réel et des dépassements d’une condition. Isolant un rectangle de matière et de lumière, chaque image est d’un plat absolu. Pourtant une perspective est offerte par l’ensemble, à la lueur du nombre de déclics. Ces vues en série dessinent les paysages perdus d’un regard fantôme.

Notes de travail, 2005/2011, pour « in the sky on the water on the floor in the wall (litanie) »