graphique d’une apparition

C’est quelque chose                                                        
Comme ça comme un dessin                                                  
Se tenant là                                                              
La chose même                                                             
Comment                                                                   
Une apparition                                                            
Une révélation aussi                                                      
Cette déflagration                                                        
Comme dire une seule parole peut guérir                                   
Comme le frisoté liquide au loin fait trembler la ligne d’horizon sur      l’océan                                                                   
Comme les inclusions de lettres dans le paysage des cartes portent le     monde physique à ma bouche                                                
Comme les sons ambiants se mélangent aux couleurs innommables dans un     mouvement total et liquide                                                
Les fables construisent le monde                                          
Magie des imbrications optiques superposables                             
Tout d’un coup d’œil                                                      
Un effet stroboscopique du réel dans ma boîte noire                       
Instantanément recousu dans ma pensée                                     
Comme mon langage met des mots à la ligne pour faire parler mes visions du réel                                                                      
Comme mes images calculent les modélisations linéaires de figures         
Comme les algorithmes d’une machine m’apprennent les choses des images    
A l’écran                                                                 
Et m’inventent                                                            
Je suis partout                                                           
Calculable et imaginable                                                  
Mes lignes de vie dessinent des équations                                 
Trajectoire en ellipses                                                   
Danse en éclipse                                                          
Images intermittentes                                                     
Recoupements et superpositions                                            
Des fumées du ciel optique                                                
Me démêler du brouillage phénoménologique                                 
Trouver les pistes vraies                                                 
Démêler les effets des trucages                                           
L’image triche à dessein                                                  
L’image de choc                                                           
Trouble ma vue                                                            
D’ombres éclairantes                                                      
Sur des vues divergentes emmêlées                                         
Tout le sens du monde en une ligne                                        
En une vue                                                                
En une mire                                                               
En une cible                                                              
Présence de l’au-delà                                                     
En cet espace autre                                                       

Frontière des ombres inversées                                            
Je fais ligne                                                             
Mon cerveau est le lieu où la lumière du réel et du soleil se rencontrent     
Partie prenante et parti pris                                             
Ce qui émerge dans le réel est ce qui m’y immerge                         
Flexueuse clé des figures qui bougent                                     
Être interface                                                            
Autre chose prolonge son corps et retourne d’où il vient pour aller se    promener dans les choses encore                                           
Quelque chose couche une ligne sur un papier et s’ajuste à mon toucher    
Cette chose du monde passe par mon corps dessinateur                      
Cette chose traverse mon œil et passe par sa pensée                       
La chose ressort par le même trou avec une main                           
Quelque chose prolonge une forme                                          
Chaque chose repasse à nouveau                                            
Autre chose se métamorphose                                               
L’image est sa mue                                                        
Imaginale                                                                 
Liquidité linéaire                                                        
De l’espace fragile et de sa destruction interprétative                   
Images                                                                    
Déflagrantes apparitions et disparitions immédiates                       
Chassées et enchâssées                                                    
L’image désire le réel                                                    
L’image épouse le réel                                                    
Le contraire aussi vrai                                                   
Des images en sandwich                                                    
Des figures de mes désirs                                                 
Pour toucher la langue des images avec les mains de mes yeux              
De tous les trous possibles                                               
Voir                                                                      
Effacer                                                                   
Recommencer                                                               
Perdre                                                                    
Retrouver                                                                 
Danser                                                                    
Toucher                                                                   
Scruter                                                                   
Sculpter                                                                  
Être dans le vrai                                                         
L’image m’ouvre une faille                                                
Je peux revenir en arrière                                                
En même temps qu’aller devant                                             
Torsion optique du réel                                                   
Ma vue déforme et mon corps suit                                          
Chacun est dans l’image plutôt que devant                                 
L’image est un cœur pendule pour le regardeur                             
Chacun marche dans l’image                                                
L’image me fait toujours ce même pied-de-nez renversant                   
Les temps iconiques fuient dans les mouvements réels                      
Unissent le mouvement de l’œil à la peau de l’image                       
Vertige du pivot                                                          
Tournis du pied dansant                                                   
Double vue                                                                
Double corps                                                              
Double point de fuite                                                     
C’est pourquoi l’image unique n’est pas possible                          
C’est pourquoi le point de vue unique n’existe pas                        
C’est pourquoi tout est en même temps                                     
Que toute chose vaut mieux qu’autre chose                                 
La vue peut être d’ici ou là tout autant qu’ailleurs                      
L’image est vivante                                                       
Organique                                                                 
Cellulaire                                                                
Double geste                                                              
L’image est geste dansant                                                 
Dans la flamme du projecteur                                              
Hypnotique lumière hachée par les rythmes                                 
Un geste en sursis                                                        
Dessine ici                                                               
Déjà parti                                                                
Un dernier geste toujours repoussé à une avant dernière fois              
Le réel est augmenté d’une optique gestuelle                              
À-coups et pauses en perpétuel mécanique font sens                        
J’existe plus avec l’image                                                
Éternité instantanée                                                      
Mon imagination                                                           
Ma fantaisie                                                              
Envolée festive des cartes postales                                       
Étendue                                                                   
C’est l’effet nénuphar des images proliférantes recouvrant le monde       
Volatile                                                                  
C’est l’effet nuées d’oiseaux des images mouvantes modifiant le monde     
La vue s’éparpille                                                        
Elle peut tout imaginer                                                   
Enrober                                                                   
Kaléidoscoper                                                             
Les failles visionnaires                                                  
L’image est moi                                                           
L’image déborde de l’image                                                
Comme un lapin blanc sort d’un chapeau                                    
Comme le vacarme d’une éruption sonore émane d’un coquillage              
Comme un oiseau sort d’un trou noir                                       
L’image est toi                                                           
Une nuée et ses volutes                                                   
Une mémoire immatérielle défile en procession                             
Des bannières d’icônes miniatures en main                                 
Comme les vols d’étourneaux dessinent en 3D des gousses prêtes à éclore   
Champ de codage                                                           
Effacer l’image d’avant                                                   
C’est la possibilité prometteuse de l’île inversée                        
A l’intérieur de cette huître se crée tout le monde                       
Des visions nacrées                                                       
Sur la peau de sa coquille                                                
Instant de mue                                                            
Mon image est cette coquille vide en attente de déflagration              
Par ses bords mon image est une coupure évidemment                        
Une fibre optique suit la courbe ondulée des fonds                        
Dans une couleur se matérialise la lumière                                
Chaque lumière imprime une action                                         
Une ligne retient sa surface                                              
Je me tiens sur cette ligne                                               
Qui rêve ou pas                                                           
L’acte théâtralise un regard                                              
La vision se transforme en geste                                          
Le futur se meut à l’envers du décor                                      
Des mains agitent une pensée temporaire                                   
Chaque mot forme une suite de grains de sable                             
Des plages égrènent les lignes de courants mouvants                       
L’horizon est la frontière réelle entre le monde et l’image               
Horizon commun de lignes individualisées du monde                         
Chacun lapin blanc sortant d’un chapeau-clic-clac                         
Image si proche                                                           
Et corps étranger frénétique                                              
Une apparition sismique                                                   
Dessinée comme si c’était déjà demain                                     
Dansant comme une image qui se frotte à mes cils                          
Dans la lumière d’un feu optique                                          
Le vertige du phare au milieu des récifs                                  
L’empreinte de l’image sur ma peau                                        
Transforme ma figure dans l’espace                                        
Comme les cheveux en bataille d’une frange impalpable                     
Rien de cette chose ne m’a quitté depuis son apparition                   
Dans son regard éternel



Note de travail 2016